30 九月 2006

Man on fire : trois niveaux de lecture


Tony Scott a realisé un film qui comporte au moins trois niveaux de lecture.
Au premier niveau, on voit un homme, John Creasy (Denzel Washington), ex-agent de la CIA,alcoolique, plutôt dépressif, bref: à deux pas tu trépas. De passage à Mexico, il se laisse pourtant convaincre par son vieil ami Rayburn (Christopher Walken) d'être le garde du corps de la petite fille d'un riche industriel, Pita Ramos. Creasy malgré ses réticences, devient comme on s'y attendait l'ami de Pita. L'homme semble renaître, il sourit à nouveau et reprend goût à la vie. Jusqu'au jour maudit où, de retour de son cours de piano, elle est enlevée puis assassinée par une obscure organisation, alors que Creasy gît, inconscient, sur un lit d'hôpital. A son réveil, une idée fixe: tuer les responsables, éliminer tous les obstacles. Son ami Rayburn résume bien alors la psychologie de Creasy:
chacun dit-il en substance est doué pour quelque chose. Creasy lui, c'est le meurtre. C'est un artiste en son genre et là il va accomplir son chef-d'oeuvre...

Le deuxième niveau s'adresse à ceux qui ont vu un film antérieur, aujourd'hui considéré comme un classique: "The king of New York" de Albel Ferrara. Cette fois Christopher Walken a le premier rôle, celui d'un homme (Frank White) qui sort de prison et décide de reprendre le contrôle du trafic de drogue sur toute la ville. White et Creasy ont plus d'un point en commun: il sont tous les deux aussi déterminés, quand le premier élimine méthodiquement ses concurrents, le second tue, impassible, tous les gens mêlés dans cette histoire d'enlèvement. Quand White, au nom angélique, devient idéaliste (il veut rénover un hôpital pour les pauvres) Creasy traverse une sorte de crise mystique....Mais surtout les deux mourront de la même façon: White, blessé au ventre, et poursuivit par la police se réfugie dans un taxi (métaphore du cercueil) où il s'endort défintivement. Creasy, lui aussi blessé, meurt complètement apaisé dans une voiture (échappant ainsi à la mort plus brutale qui l'attendait...)

Le troisième niveau ou troisième étage a en effet une dimension plus céleste, plus religieuse. Creasy est au début du film un homme perdu ("crazy"), à la barbe hirsute, au regard vide. Traversant le désert mexicain avec sa bible, cet ancien tueur pétri de remords répète à son ami: "Dieu nous pardonnera-t-il pour ce que nous avons fait...."
Il ne semble alors plus maître de son destin, se laissant conduire jusqu'à son vieil ami Rayburn qui lui proposera ce job. Mais beaucoup plus surprenant, alors qu'il tente de se suicider, la balle reste mystérieusement coincée dans son révolver...
On comprend vite que ce miraculé, qui aurait dû mourir lors de l'enlèvement de Pita (il prend tout de même plusieurs balles dans la poitrine !!!) ne peut décidément pas partir avant d'accomplir son ultime mission parmi nous: le sacrifice de sa propre vie pour en sauver une autre. D'ailleurs John Creasy n'a-t-il pas les mêmes initiales que Jésus Christ....